22
Il n’y avait pas grand monde à prévenir.
Patricia Bigge, la mère de Cynthia, avait été l’unique sœur de Tess. Leurs parents étaient bien entendu décédés depuis longtemps. Malgré son bref mariage, Tess n’avait jamais eu d’enfants, et tenter de retrouver son ex-mari ne présentait aucun intérêt. Il ne serait pas venu, et, de toute façon, Tess n’aurait pas voulu de cet enfoiré à son enterrement.
De plus, Tess n’avait conservé aucune relation avec les employés de la voirie du comté, service où elle avait travaillé jusqu’à sa retraite. Elle disait d’ailleurs s’y être fait peu d’amis. Ils n’appréciaient guère ses idées libérales. Elle faisait bien partie d’un club de bridge, mais Cynthia n’en connaissait aucun membre.
Encore que nous n’eussions besoin de prévenir personne pour les funérailles puisque la mort de Tess Berman fit la une aux infos.
On passa des interviews de personnes habitant la même rue abondamment boisée qu’elle, dont aucune, du reste, n’avait remarqué quoi que ce fût d’inhabituel dans le voisinage au cours des heures qui avaient précédé sa mort.
« Ça fait vraiment réfléchir », disait l’un.
« Des choses pareilles n’arrivent jamais par ici », ajoutait un autre.
« On n’oublie plus jamais de fermer nos portes et nos fenêtres le soir », précisait un troisième.
Si Tess avait été poignardée par un ancien mari ou un amant plaqué, les voisins auraient peut-être été moins inquiets. Mais la police avouait n’avoir pas le moindre suspect, ni la moindre idée du mobile.
Il n’y avait pas de signes d’effraction, pas de traces de lutte, hormis la table de la cuisine légèrement de travers et une chaise renversée. Il semblait que l’assassin de Tess l’avait frappée par surprise, qu’elle n’avait résisté qu’un court instant, juste le temps de faire trébucher son agresseur contre la table – il avait heurté la chaise. Ensuite le couteau avait été enfoncé jusqu’au manche, et elle était morte.
D’après la police, son corps gisait sur le sol depuis déjà vingt-quatre heures.
Je pensais à tout ce que nous avions fait pendant que Tess baignait dans son propre sang. Nous préparer pour aller nous coucher, dormir, nous lever, nous brosser les dents, écouter les infos du matin à la radio, partir travailler, rentrer dîner, vivre une journée entière de notre vie, que Tess n’avait pas vécue.
Penser à cela était vraiment insupportable.
Comme je m’obligeais à ne plus le faire, mon esprit passa à des sujets tout aussi dérangeants. Qui avait fait ça ? Pour quelle raison ? Tess avait-elle été la victime d’un crime de hasard, ou bien cette agression avait-elle un rapport avec Cynthia ?
Où était la carte de visite de Denton Abagnall ? Tess ne l’avait-elle pas punaisée sur le panneau, ainsi qu’elle me l’avait dit ? Ou bien, estimant qu’elle ne recueillerait pas de nouvelles informations, avait-elle jeté la carte à la poubelle ?
Le matin suivant, torturé par ces questions, et bien d’autres encore, je pris la carte que le détective nous avait laissée et composai son numéro de portable.
Sa messagerie se déclencha aussitôt. Le téléphone devait être éteint.
Je fis alors une tentative à son domicile. Une femme décrocha.
– Puis-je parler à M. Abagnall ?
– Qui le demande ?
– Vous êtes Mme Abagnall ?
– Qui êtes-vous, s’il vous plaît ?
– Terry Archer.
– Ah, monsieur Archer ! s’exclama-t-elle, apparemment dans tous ses états. J’allais justement vous appeler.
– Madame Abagnall, il faut absolument que je parle à votre mari. Il est possible que la police l’ait déjà contacté. Je leur ai donné son nom hier soir, et…
– Vous avez eu de ses nouvelles ?
– Pardon ?
– Vous avez eu des nouvelles de Denton ? Vous savez où il se trouve ? demanda Mme Abagnall.
– Non, je n’en sais rien.
– Ça ne lui ressemble pas du tout. Il lui arrive de travailler toute la nuit, pour des filatures, mais il me passe toujours un coup de fil à un moment donné.
Un mauvais pressentiment naquit au creux de mon estomac.
– Il était chez nous hier après-midi. En fin d’après-midi. Il nous a mis au courant de ses recherches.
– Je sais, répliqua-t-elle. Je lui ai téléphoné juste après qu’il a quitté votre maison. Il m’a dit que quelqu’un lui avait laissé un message, et devait le rappeler.
Je me souvenais du portable d’Abagnall sonnant pendant qu’il était dans le salon, d’avoir pensé qu’il s’agissait de sa femme voulant lui annoncer ce qu’elle préparait à dîner, de sa surprise en découvrant que l’écran n’affichait pas son propre numéro, et que, du coup, il avait laissé la messagerie se déclencher.
– Cette personne l’a rappelé ?
– Je n’en sais rien. C’est la dernière fois que je lui ai parlé.
– La police vous a contactée ?
– Oui, répondit Mme Abagnall. J’ai failli avoir une crise cardiaque quand ils sont venus sonner à la porte ce matin. Mais c’était au sujet d’une femme, du côté de Derby, qui a été assassinée chez elle.
– La tante de ma femme. Nous sommes allés lui rendre visite hier et avons découvert son corps.
– Oh, mon Dieu. Je suis sincèrement désolée.
Je réfléchis à ce que j’allais dire ensuite, étant donné ma nouvelle habitude de cacher des choses aux gens, par crainte de les inquiéter inutilement. Mais cette politique ne semblait pas très payante. Aussi repris-je :
– Madame Abagnall, je ne veux pas vous affoler, et je suis certain que votre mari a une excellente raison de ne pas vous avoir appelée, mais, à mon avis, vous devriez prévenir la police.
– Ah, murmura-t-elle.
– Je vous conseille de leur expliquer que vous êtes sans nouvelles de lui. Même si cela fait peu de temps.
– D’accord. Je vais le faire.
– Et n’hésitez pas à me téléphoner si vous apprenez quoi que ce soit. Je vais vous laisser mon numéro de portable et celui de la maison.
Elle n’eut pas à me prier de patienter pour trouver un stylo. À mon avis, étant mariée à un détective, il devait toujours y avoir un bloc et un crayon près du téléphone.
Cynthia entra dans la cuisine alors que je raccrochais. Elle s’apprêtait à retourner à l’entreprise de pompes funèbres. Tess, bénie soit-elle, avait tout planifié par avance, afin de faciliter les choses à ceux qu’elle aimait. Elle avait payé ses funérailles par petites mensualités, des années plus tôt. Ses cendres devaient être dispersées dans le détroit de Long Island.
– Cynthia.
Elle ne répondit pas. Elle me snobait littéralement. Sans se soucier que je trouve cela cohérent, elle me tenait, du moins en partie, pour responsable de la mort de Tess. Je finissais moi-même par me demander comment les choses auraient tourné si j’avais mis ma femme au courant de ce que je savais. Si elle avait su comment Tess lui avait payé ses études, se serait-elle trouvée à la maison lorsque son meurtrier avait sonné ? Ou bien les deux femmes se seraient-elles retrouvées sur la route, œuvrant en équipe pour épauler Abagnall dans ses recherches ?
Impossible de le savoir. Et j’allais devoir vivre avec cette incertitude.
Bien entendu, Cynthia avait pris un congé indéterminé à la boutique, et j’avais prévenu le lycée que je resterais absent plusieurs jours, qu’il valait mieux me trouver un remplaçant pourvu d’un emploi du temps dégagé. Je lui souhaitais bonne chance avec ma bande de loustics.
– Je ne te cacherai plus jamais rien, Cynthia. Or il s’est passé quelque chose que tu dois savoir.
Elle s’arrêta sur le seuil de la cuisine, sans pour autant se retourner vers moi.
– Je viens de parler à la femme de Denton Abagnall. Il a disparu.
Cynthia vacilla légèrement, puis finit par demander :
– Qu’est-ce qu’elle a dit ?
Je lui racontai notre échange téléphonique.
Elle resta immobile quelques instants, une main posée sur le mur pour affermir son équilibre, puis elle déclara :
– Je dois aller aux pompes funèbres, prendre des dispositions de dernière minute.
– Je comprends. Tu veux que je t’accompagne ?
– Non, répondit-elle avant de quitter la pièce.
Pendant un moment, je restai moi-même désemparé, ne sachant quoi faire, hormis m’inquiéter. Je rangeai la cuisine, tournicotai dans la maison, essayai, sans succès, de fixer plus solidement le télescope de Grace sur son trépied.
En passant devant la table du salon, mes yeux tombèrent sur les deux boîtes à chaussures qu’Abagnall nous avait rendues la veille. Je les emportai dans la cuisine.
Installé devant la table, je commençai à vider ce qu’il y avait dedans. Un peu comme l’avait fait le détective, probablement.
Lorsque Cynthia, adolescente, avait quitté sa maison, elle s’était à peu près contentée de renverser le contenu des tiroirs dans ces carions, y compris ceux des tables de chevet de ses parents. Comme la plupart des tiroirs de petit format, ils avaient accueilli des objets plus ou moins importants, monnaie d’appoint, clefs dont on ne savait plus ce qu’elles ouvraient, tickets de caisse, bons de réduction, coupures de journaux, boutons, vieux stylos.
Si Clayton Bigge n’était pas un grand sentimental, il conservait de drôles de choses, comme des coupures de presse. Par exemple, celles sur l’équipe de basket dont Todd faisait partie et tout ce qui avait un rapport avec la pêche. Cynthia m’avait raconté qu’il lisait les pages sportives des journaux pour suivre les tournois de pêche, et les rubriques touristiques pour leurs articles évoquant des lacs reculés si poissonneux que leurs hôtes sautaient presque dans le bateau.
Le carton contenait bien une demi-douzaine de coupures de presse, que Cynthia avait sans doute trouvées dans la table de chevet de son père, des années plus tôt, avant que le mobilier et la maison ne soient liquidés et vendus. Je me demandais quand elle se déciderait enfin à s’en débarrasser. Je dépliai chaque coupure jaunie, prenant garde à ne pas les déchirer, les vérifiant une par une.
Un détail sur l’une d’elles attira mon attention.
Il s’agissait d’un article sur la pêche à la mouche en rivière découpé dans le Hartford Courant. La personne qui avait exécuté l’opération – Clayton, a priori – s’était appliquée à en suivre méticuleusement les contours, guidant avec soin les ciseaux le long de l’étroit espace séparant sa première colonne de la dernière d’un autre article qui avait été écarté. Il était placé au-dessus de publicités invisibles, ou d’autres pavés de texte, empilés en escalier dans l’angle gauche en bas de la page.
C’est pourquoi il me parut étrange qu’on ait conservé un entrefilet sans rapport avec la pêche à la mouche.
Celui-ci ne faisait que quelques lignes :
La police n’a toujours aucune piste sur la collision fatale à Connie Gormley, 27 ans, habitante de Sharon, dont le corps a été retrouvé dans un fossé de la nationale 7, samedi matin. Les enquêteurs pensent que la jeune femme, célibataire et employée au Dunkin’ Donuts de Torrington, marchait le long de la nationale, près du Cornwall Bridge, lorsqu’elle a été renversée par une voiture qui se dirigeait vers le sud, tard vendredi soir. Selon les policiers, il semblerait que le corps de Mlle Gormley ait été déplacé dans le fossé après avoir été heurté par la voiture. La police suppose que le conducteur a écarté le corps de la route afin qu’on ne le remarque pas tout de suite.
Pourquoi, me demandai-je, tout ce qui entourait l’article avait-il été soigneusement éliminé, excepté cet entrefilet laissé intact ?
La date sur la page indiquait le 15 octobre 1982. J’étais en train de méditer là-dessus lorsqu’on frappa à la porte. Mettant la coupure de journal de côté, j’allai ouvrir.
Keisha Ceylon. La voyante. La femme qui avait servi d’appât aux producteurs de l’émission de télévision pour tenter de nous piéger, et qui avait inexplicablement perdu son aptitude à capter les vibrations surnaturelles après avoir compris qu’elle ne serait pas rétribuée pour ses dons. – Monsieur Archer ?
Elle était toujours habillée à contre-genre, un tailleur strict, sans châle ni immenses boucles d’oreilles.
Je hochai la tête avec méfiance.
– Je suis Keisha Ceylon, reprit-elle. Nous nous sommes rencontrés dans les locaux de la chaîne de télé.
– Je m’en souviens.
– Tout d’abord, je voudrais m’excuser pour ce qui s’est passé là-bas. Ils avaient promis de me dédommager, et on n’aurait jamais dû exposer notre différend devant votre épouse.
Je ne répondis pas. Elle combla le blanc de la conversation, ne s’attendant manifestement pas à un tel mutisme de ma part.
– Bref, il n’en reste pas moins que j’avais des éléments à vous communiquer, qui pourraient vous aider au sujet de la famille disparue de Mme Archer.
Je ne disais toujours rien.
– Je peux entrer ? poursuivit-elle.
J’avais envie de lui claquer la porte au nez, puis je songeai à la remarque de Cynthia avant notre départ pour le siège de la chaîne, quand elle avait dit accepter d’être prise pour une imbécile s’il y avait une chance fût-ce sur un million, qu’on nous apprenne quelque chose d’intéressant.
Même si Keisha Ceylon avait voulu nous escroquer, le fait qu’elle revienne à la charge m’incitait à lui donner la possibilité de s’expliquer.
Aussi, après un moment d’hésitation, je la fis entrer. Puis la guidai vers le canapé du salon, celui sur lequel s’était trouvé Abagnall quelques heures auparavant. Je m’assis en face d’elle et croisai les jambes.
– Je comprends que vous soyez sceptique, affirma-t-elle. Mais nous sommes en permanence entourés de forces mystérieuses, et très peu d’entre nous savent les exploiter.
– Mmm.
– Lorsque j’entre en possession d’une information susceptible d’être importante pour une personne traversant des moments difficiles, j’éprouve l’obligation de partager cette connaissance. C’est une responsabilité indiscutable quand on a la chance d’être gratifié d’un don pareil.
– Certainement.
– L’aspect financier est secondaire.
– Je m’en doute.
Si j’avais été presque bien intentionné à l’égard de Keisha Ceylon l’instant d’avant, je commençais déjà à me reprocher mon erreur.
– De toute évidence, vous ne me prenez pas au sérieux, mais je vois vraiment des choses, monsieur Archer.
N’était-elle pas censée dire plutôt « je vois des morts » ? C’était ça, son texte, non ?
– Et je suis prête à les communiquer, si votre femme et vous-même le désirez, ajouta-t-elle. Je vous demanderai néanmoins de m’allouer une sorte de compensation. Vu que la chaîne de télé a refusé de le faire en votre laveur.
– Ah-ah. Et une compensation de quel ordre aviez-vous en tête ?
Ceylon haussa les sourcils, comme si elle n’avait envisagé aucun montant avant de frapper à notre porte.
– Eh bien, répondit-elle, vous me mettez dans l’embarras. Je pensais à quelque chose approchant les mille dollars. C’est la somme que m’avait promise la chaîne, avant qu’ils retournent leur veste.
– Je vois. Vous pourriez peut-être me donner un aperçu de cette information, ça me permettrait de décider si le reste vaut vraiment mille dollars.
Ceylon hocha la tête.
– Cela me semble raisonnable. Accordez-moi juste quelques secondes.
Elle s’adossa aux coussins et ferma les yeux. Durant presque une minute, elle resta immobile, sans émettre le moindre son. On aurait dit qu’elle entrait en transe, qu’elle se préparait à se connecter avec le monde des esprits.
– Je vois une maison, murmura-t-elle enfin.
– Une maison, répétai-je.
C’était un début.
– Dans une rue. Des enfants qui jouent, et beaucoup d’arbres. Je vois une vieille dame qui passe devant cette maison, avec un vieux monsieur, et un autre homme qui marche près d’eux, mais plus jeune. C’est peut-être leur fils. Je crois que ça pourrait être Todd… J’essaie de me concentrer sur la maison, de bien la voir…
Je me penchai vers elle.
– Cette maison, elle est jaune pâle ?
Keisha Ceylon serra plus fort les paupières.
– Oui… Oui, c’est cela.
– Mon Dieu ! Et les volets, ils sont verts ? Vert foncé ?
Elle inclina un peu la tête sur le côté, comme pour vérifier.
– Oui, vert foncé.
– Et sous les fenêtres, il y a des jardinières ? Avec des fleurs ? Des pétunias ? Vous êtes en mesure de le dire ? C’est très important.
Elle hocha très lentement la tête.
– Oui. Oui, vous avez parfaitement raison. Les jardinières sont garnies de pétunias. Cette maison, vous la connaissez ?
– Non, répondis-je sèchement. Je l’invente au fur et à mesure.
Les yeux de Ceylon se rouvrirent, étincelants de colère.
– Espèce d’ignoble salaud, fulmina-t-elle.
– Je pense que nous avons terminé.
– Vous me devez mille dollars.
Trompe-moi une fois, honte à toi, trompe-moi deux fois, honte à moi…
– Je ne crois pas, non, rétorquai-je.
– Vous allez me payer mille dollars, parce que… – elle cherchait un argument –… parce que je sais autre chose. J’ai eu une autre vision. À propos de votre petite fille. Elle va être en grand danger.
– En grand danger, vraiment.
– Parfaitement. Elle est dans une voiture. Tout en haut. Payez-moi, et je vous en dirai plus pour que vous puissiez la sauver.
J’entendis une portière claquer dehors.
– Moi aussi, j’ai une vision, dis-je en posant les doigts sur mes tempes. Je vois ma femme passer cette porte d’ici quelques secondes.
Ce qu’elle fit. Cynthia embrassa le salon du regard, sans un mot. Je pris un ton désinvolte :
– Ah, ma chérie. Tu te souviens de Keisha Ceylon, la plus grande voyante du monde. Comme elle vient de se prendre une méchante claque avec le coup de l’évocation du passé, son dernier recours pour nous extorquer mille dollars est de concocter une nouvelle vision impliquant l’avenir de Grace. En d’autres termes, elle essaie d’exploiter nos pires craintes, pendant qu’on est au plus mal. C’est bien ça ? ajoutai-je à l’intention de Keisha Ceylon.
Elle ne répondit pas.
– Comment ça s’est passé aux pompes funèbres ? demandai-je à Cynthia, avant d’ajouter pour Keisha : Sa tante vient de mourir. Vous ne pouviez pas mieux tomber.
Tout se passa très vite.
Cynthia agrippa la femme par les cheveux, l’arracha du canapé, et la traîna en vociférant vers la porte.
Son visage était rouge de colère. Malgré sa faible corpulence, elle trimballa Keisha comme si c’était une poupée de son, indifférente aux hurlements et au flot d’insultes qui jaillissaient de sa bouche.
Arrivée devant la porte, elle l’ouvrit de sa main libre, et poussa l’arnaqueuse à l’extérieur de la maison. Mais Keisha ne parvint pas à retrouver son équilibre et dévala les marches, tombant la tête la première sur la pelouse.
Avant de claquer la porte, Cynthia lui cria :
– Foutez-nous la paix, espèce d’immonde vampire opportuniste !
Ses yeux étincelaient encore de rage lorsqu’elle me regarda, cherchant à reprendre son souffle.
Moi aussi, j’avais l’impression d’être hors d’haleine.